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Grasshopper Manufacture s’est fait, en l’espace de quelques années, un sacré nom dans le milieu du jeu vidéo pour hardcore gamers. Avec des titres tels que No More Heroes 1 et 2, Shadows of the Damned et prochainement Lollipop Chainsaw, autant dire que le CV du studio est une véritable perle rare. Sine Mora, leur dernière production en date, a choisi un univers jusque-là délaissé par ces créateurs de talents : le shoot’em up. L’aura de réussite qui entoure les productions made in Grasshopper émanera-t-elle de ce jeu de tir ? La réponse ici-même

Le complexe de la bombe H

L'empire Layil juste avant de larguer les 4 bombes H qui vont faire basculer le monde de Sine Mora

Sur une planète inconnue, l’Empire Layil dirige d’une main de fer la vie sur le continent. Une à une, il écrase les poches de résistance et dissout petit à petit les états avoisinants, transformant leurs peuplades en êtres décérébrés utilisés comme esclaves. Une nation résiste pourtant tant bien que mal: Les Enkies. Ne voulant pas du système dictatorial particulièrement tyrannique de Layil, ces courageux soldats se battent vaillamment pour conserver leur précieuse liberté, et ce malgré la mainmise de l’ennemi sur le voyage spatio-temporel, véritable nerf de la guerre depuis des décennies. Hélas, cette fragile résistance va subir une chaotique défaite en ce jour funeste où l’Empire décide de larguer quatre bombes H sur la nation Enkie.

Plus de 400.000 vaillants guerriers, mais également des femmes et des enfants innocents, périssent en une fraction de seconde. La guerre est finie, le tribut est lourd, et l’Empire se gausse de sa suprématie…mais tout espoir n’est pas perdu puisque des années plus tard, une opération de contre-attaque va être menée par les rares survivants encore en état de se battre. Dans le même temps, Ronatra Koss, un ancien soldat impérial invalide et désabusé par la perte de son fils au combat, va faire pencher, sans le savoir, la balance du côté des rebelles. Comment ces deux histoires vont-elle s’imbriquer? Il va falloir jouer à Sine Mora pour le savoir.

Tant de choses à faire…et si peu de temps!

Le soft tend clairement vers le manic shooter

Sine Mora a l’apparence d’un shoot’em up classique à défilement horizontal. Vous dirigez un vaisseau qui dispose de deux tirs: un principal, classique et infini, et un secondaire, surpuissant et limité. Chaque personnage que vous incarnez dispose d’un engin différent, typé avion à hélice pour la plupart, et de fait d’un tir secondaire qui lui est propre. Cela va de l’explosion qui balaie l’écran à la pluie de missiles, en passant par le double laser qui vaporise tout sur son passage. La maniabilité est identique d’un aéroplane à l’autre et se montre rapide et nerveuse. L’arme principale est upgradable sur 9 niveaux que vous perdrez si vous vous faites toucher, mais que vous pourrez récupérer si vous êtes assez rapide pour rattraper au vol les bonus qui se disperseront de votre carlingue. Bref, on navigue en territoire connu et on pourrait se dire que Grasshopper a cédé aux sirènes de la facilité…mais il n’en est rien car un concept vient bouleverser toutes vos habitudes de gamer: le temps!

Le concept est simple: le chrono diminue constamment et vous tuez des ennemis pour gagner du temps, que vous perdrez doublement si vous vous faites toucher

Le temps, c’est principalement la raison d’être de Sine Mora. Pas d’énergie pour votre avatar, mais un chronomètre taillé au centième de seconde. Le concept est simple: le chrono diminue constamment et vous tuez des ennemis pour gagner du temps, que vous perdrez doublement si vous vous faites toucher. Tout tient en une phrase, mais cela vient profondément changer les mécaniques habituelles de ce type de soft. En effet, ce système vous obligera à aller constamment au contact de l’ennemi. Cela va vous faire vivre un sacré dilemme car si vous êtes trop imprudents, vous risquez de vous faire toucher et donc de perdre vos précieuses secondes qui s’égrènent déjà assez rapidement comme ça. Une tension permanente s’installe, d’autant que le jeu est parfois avare de checkpoints, seuls endroits où votre chrono est réinitialisé. Scénaristiquement, le tout se tient puisque votre coucou mène des batailles dans le passé et le futur grâce à la technologie de voyage spatio-temporel. Il en résulte donc que lorsque votre compteur atteint zéro, vous perdez toute consistance dans cette époque à laquelle vous n’appartenez pas. Autre particularité liée au temps: la présence d’une jauge de ralenti, qui vous permettra de freiner l’action autour de vous pour mieux esquiver les tirs ennemis.

Loin d’être une « Sine »…cure

Le soft, développé conjointement par Grasshopper et Digital Reality, se veut résolument mâture. En effet, même si les personnages ont un look d’animal typique de Starfox, le fond du propos est dur, sombre, malsain. Entre une histoire de vengeance d’un père prêt à tout pour assassiner les membres de l’escouade à laquelle appartenait son défunt fils, les trahisons, les personnages condamnés d’avance et cette rébellion qui se rend petit à petit compte des atrocités commises par l’Empire Layil et de la possible futilité de leur révolte, le récit va clairement vous mettre mal à l’aise…et pourtant tout n’est indiqué que par des textes et une voix à la consonance étrangère (on dirait du norvégien, mais le langage est totalement inventé) qui vous plonge d’office dans un certain malaise. Je suis resté sous le charme de ces mots choisis à la perfection pour vous décrire une situation de plus en plus sombre.

Graphiquement le soft est sublime, avec des angles de caméra hyper immersifs

Mais encore plus que dans son histoire, c’est dans sa mécanique de jeu que Sine Mora va réveiller le hardcore gamer qui sommeille en vous. Le jeu fait clairement partie des manic shooters et va, dans les derniers niveaux, vous faire verser de grosses gouttes de sueur sur votre pad. D’autant qu’au fil des 8 niveaux, les boss gagnent en nombre et en puissance, et il ne sera pas rare de recommencer un level depuis le début pour économiser LE tir secondaire qui vous permettra de vaincre l’ennemi. Ajoutez à cela le fait que dans un même stage, vous partagez tous les upgrades d’armes et les bonus avec les différents persos que vous serez amenés à incarner, et vous comprendrez que le jeu n’est clairement pas destiné aux petits joueurs.

En supplément, trois autres modes de jeu viennent étoffer le story mode, dont la vraie fin ne pourra être révélée qu’après l’avoir terminé en normal. Ainsi, un mode arcade ultra jouissif qui oublie tout le côté scénar pour se concentrer sur l’intensité des combats sera de la partie (avec classement mondial online), de même qu’un mode Boss (entrainement contre chaque monstre de fin de section avec vies illimitées) et qu’un ultra complet mode scoring sont également présents. Ce dernier va vous occuper pas mal de temps, puisqu’il permet de jouer chaque section avec le perso, le pouvoir temporel et l’avion de votre choix. Que dire également des différents embranchements scénaristiques à l’intérieur même des niveaux, qui vous obligeront à refaire le jeu plusieurs fois si vous voulez tout voir et tout comprendre de ce scénario morcelé et ultra prenant. La quintessence de Sine Mora se mérite au prix de grands efforts, mais c’est dans la douleur qu’on prend le plus de plaisir, non?

La « Mora »-le de l’histoire

La cité impériale est superbe dans sa décadence

Doté d’une réalisation de haute volée grâce à des graphismes 3D saisissants de beauté, une animation jamais prise en défaut et une ambiance sonore aux petits oignons, Sine Mora se paie en plus le luxe de dépoussiérer un genre qui en avait légèrement besoin grâce à son concept génial lié au temps. Grasshopper et Digital Reality ont fait des merveilles et le soft plaira d’emblée aux gamers qui n’ont pas froid aux yeux. On ne saurait que trop vous conseiller de vous laisser tenter, vous allez vivre une expérience de shoot absolument dantesque dans un récit qui prend aux tripes, et à ce prix il serait dommage de se priver! Dommage seulement que l’expérience ne puisse se partager à deux, mais Sine Mora a trop de qualité pour lui en tenir réellement rigueur. Un must, tout simplement!

 

Le vidéo-test

Réalisation: 18/20

Sine Mora est tout simplement à l’heure actuelle le plus beau shoot à scrolling horizontal disponible sur le marché. Avec des effets de lumières qui vous scotchent la rétine dès les premiers instants, un niveau de détail incroyable et une animation sans faille, le soft fait clairement partie de ce qui se fait de mieux à ce niveau

Gameplay/Scénario: 18/20

Le scénario résolument mâture brille par la sobriété de sa mise en scène réduite à quelques lignes de texte et une voix off dont le langage inventé donne toute sa gravité au récit. Le voyage dans le temps ne nous embarque pas dans une histoire alambiquée, le morcellement des points de vue donne énormément de jouissance et tout est clair une fois le dernier niveau achevé. Le gameplay, quant à lui, est totalement addictif avec ce partage des upgrades entres personnages et surtout le concept du temps comme énergie, qui crée une tension sans précédent pour un manic shooter. Une réussite!

Bande-Son: 16/20

Les musiques sont discrètes et ce sont surtout les bruitages qui vous mettront dans l’ambiance, avec des déflagrations réalistes et des tiraillements mécaniques qui vous feront comprendre toute l’imposante fureur des boss. Les voix des protagonistes sonnent justes et le langage inventé est très immersif (sincèrement, il m’est arrivé de lancer un ou deux jurons typiques du dialecte de Sine Mora une fois arrivé face au monstre de fin^^)

Durée de vie: 15/20

Huit niveau pour six heures de jeu, ça peut sembler court, mais c’est tout à fait raisonnable pour un shoot’em up, d’autant que pour voir la vraie fin il va falloir vous accrocher! De plus, les modes arcade et scoring vont vous prendre un bon paquet d’heures en plus pour peu que vous adhériez à l’idée. Petit bémol pour l’absence de jeu à deux qui aurait pu être plus que sympathique.

Note Globale N-Gamz.com: 18/20

Sine Mora est LE shoot’em up à scrolling horizontal que vous devez posséder sur XBox360. Beau à se damner, fluide, intense et incroyablement profond, le soft va vous faire passer des heures de plaisir pour peu que vous soyez adepte du scoring. Et même si vous ne l’êtes pas, l’immersion du mode story devrait largement vous satisfaire. Mais attention, Sine Mora se joue seul. Un « plaisir solitaire » dont on aurait tort de se priver tant l’oeuvre entière confine au génie. 



About the Author

Neoanderson (Chapitre Sébastien)
Hardcore gamer dans l'âme, la quarantaine depuis peu, je suis le rédacteur en chef autant que le rédacteur de news et le vidéo-testeur de ce site (foncez sur la chaîne YouTube d'ailleurs). Amoureux des RPG nourri aux Final Fantasy, Chrono Trigger, Xenogears et consorts, je suis également fan de survival/horror. Niveau japanim, je voue un culte aux shonens/seinens tels que Ga-Rei, L'Ile de Hozuki, Orphen, Sprite ou encore Asebi. Enfin, je suis un cinéphile averti, orienté science-fiction, fantastique et horreur, mes films cultes étant Star Wars, Matrix, Sucker Punch, Inception et Tenet. N'hésitez pas à me suivre via mon Facebook (NeoAnderson N-Gamz), mon Twitter (@neo_ngamz) et mon Instagram (neoandersonngamz)!