Review
VanRah est une mangaka française bien connue du public puisqu’on lui doit le très apprécié Stray Dog aux éditions Glénat, une relecture du mythe du loup-garou sur fond de fantastique, steampunk et magie noire, dans un univers complexe qu’elle a créé de toutes pièces: Ishtar! Cette fois, la demoiselle s’essaie à l’exercice délicat de la préquelle avec MortiCian, toujours chez le même éditeur. De quoi replonger avec délice dans le monde si particulier de l’auteure?
Ishtar, une cité où les Hommes ont asservi les karats, des démons qui peuvent prendre forme humaine, à tel point que ces derniers sont traités comme du bétail et parqués dans des districts où règnent l’injustice et la pauvreté.
C’est dans ce climat de « racisme » pur et dur que l’on va suivre les aventures de Senri et Kazuhiro, deux chirurgiens humains de talent qui vont être confrontés à la détresse des Karats, mais aussi le destin de Tsubaki, la fille de Senri, qui va faire la rencontre « fortuite » du Seigneur Ekheri, l’un des derniers lycans, seul survivant de son clan, qui vit reclus dans un temple en compagnie d’Alphar et Halicar, ses loups de feu.
Mais le quotidien de tout ce petit monde va vite basculer dans l’horreur quand apparaît Autaria Chihiro, le démon oiseau aux ailes d’anges, qui a décidé que la ségrégation des karats avait assez duré et qu’il fallait déclencher une guerre ouverte avec la race humaine pour restaurer la dignité de ses pairs. Ekheri acceptera-t-il de lui prêter main forte et d’organiser la destruction d’Ishtar?
Graphiquement, on retrouve avec plaisir le style bourré de détails et la classe naturelle des personnages imaginés par VanRah, avec un look parfois assez androgyne pour les héros masculins et un côté gothique prononcé. On apprécie également le duo de chirurgiens qui se la jouent parfois « Dr. House » et font preuve d’une maîtrise technique qui prouve le passé de médecin de l’auteure. Les séquences d’action sont, de leur côté, brillamment mises en scène et on regrettera juste quelques confusions entre Senri et un barman karat en début de tome, qui nous a un peu embrouillés.
Il faut dire que sur le plan du récit, l’histoire multiplie les points de vue et les références à Stray Dog. De fait, pour moi qui n’ait jamais lu la saga principale de VanRah, je dois bien avouer avoir du m’y reprendre à deux reprises lors de certains passages pour être sûr de tout saisir tant l’univers est dense.
Il va donc de soi que l’oeuvre a été conçue avant tout pour les fans de l’auteure qui ont dévoré Stray Dog, et ceux-là seront assurément aux anges de découvrir comment tout a commencé. Les autres, comme moi, risquent d’avoir un peu plus de mal pour passer la phase « initiation » et se sentir vraiment à l’aise avec tout le lexique et le monde imaginé par la mangaka.
Vous l’aurez compris, si vous êtes fan d’Ishtar et de ses personnages, vous allez adorer ce MortiCian qui reprend le graphisme perfectionniste de VanRah et la complexité de ses récits faisant directement référence à des événements marquants de l’Histoire, le tout sur fond de mythe du loup-garou. Dans le cas contraire, attendez peut-être un second volume histoire de voir si l’accessibilité est au rendez-vous pour le non initié.