Review
Habituellement relégué aux portages de softs de tous genres et à un travail d’éditeur, Aspyr Media lance son premier jeu développé en interne. Prenant le parti de la réalité virtuelle (via Oculus, Vive et PSVR, version testée ici), le studio s’est entouré de noms ayant travaillé sur des licences aussi prestigieuses que Tomb Raider et Bioshock, excusez du peu. Et du talent de ses collaborateurs, Torn en a clairement bénéficié, ce qui rend le résultat final d’autant plus frustrant… Récit d’un gâchis.
A Torn ou à raison
Dans la peau de la journaliste Katherine Patterson, à la recherche d’un scoop juteux, vous explorerez un magnifique manoir abandonné, lieu riche en secrets et en inventions ingénieuses. Votre guide ? Talbot, le propriétaire des lieux, matérialisé sous la forme d’une sphère lumineuse tournoyant autour de vous. Pas le temps de s’étonner de la situation, vous aurez fort à faire pour aider Talbot à retrouver la mémoire et retracer les événements l’ayant mené à sa perte.
Pour une première percée dans le monde de la réalité virtuelle, Aspyr soigne sacrément bien son entrée: après un virevoltant générique, impressionnant là où il aurait pu se montrer nauséeux, le sentiment de présence dans ce luxueux manoir est en tous points remarquable. Les brillantes compositions signées Gary Schyman, compositeur de Bioshock, vous accompagnent de leurs tonalités mélancoliques et mystérieuses et poussent toujours plus le désir d’exploration. Mais pour ce faire, il faudra résoudre une longue série de puzzles. Enfin, on sera plutôt tenté d’écrire « puzzle » au singulier…
Plaiestation VR
Ne tournons pas autour du pot: le gameplay de Torn est une plaie. Non, ce n’est pas la faute des PS Moves, qui ont depuis longtemps montré leurs limites, mais qui font le boulot correctement ici, que l’on choisisse les déplacements par téléportation ou la marche libre. Ce n’est pas non plus la faute du casque de Sony, parfaitement apte à accueillir le manoir de Talbot dans toute sa splendeur, malgré un aliasing plutôt présent.
Mais pourquoi vous décrire avec des mots ce que l’on pourrait résumer avec une simple image ? Je vous invite à vous détourner de ce texte pour jeter un œil sur l’illustration située sur la gauche. C’est fait ? Voilà, grossièrement, résumé le seul et unique puzzle proposé par Torn et répété ad nauseam. Equipé d’un gadget vous permettant d’aspirer des éléments du décor (par ailleurs fun à utiliser, on se plaira à imaginer un Ghostbusters ou un Luigi’s Mansion signé Aspyr), vous manipulerez différents éléments de décor, certains affichant une certaine forme qu’il faudra alors aligner sur le socle ayant la forme correspondante. Parfois, il faudra aussi remplir certains espaces avec des objets plus ou moins gros, en fonction de la taille du rectangle affiché.
C’est tout ? Oui, c’est tout. 3 fois par pièce visitée. Sur presque 5 heures de jeu. La seule motivation sera d’accéder à un monologue de Talbot une fois tous les circuits d’une pièce reliés afin d’en apprendre plus sur l’histoire, réellement bien écrite. Un bémol, et pas des moindres: en dehors du menu principal, rien n’est traduit en français. Pas la moindre trace de sous-titres VO, non plus. Autant dire qu’un niveau d’anglais correct sera nécessaire pour apprécier les qualités d’un jeu aussi bavard.
Réalité virtuhell
Parce que pour une simple boule d’énergie, il est sacrément bavard, le Talbot. En dehors de ses monologues, certains s’étalant sur de très longues minutes, le bonhomme vous prodiguera ses conseils et ses encouragements sans arrêt. Si des conseils étaient nécessaires, cela pourrait se justifier. Mais vous avez vraiment envie d’entendre un type vous répéter encore et encore comment connecter des circuits après plusieurs heures à faire sa basse besogne ? « Mets le bazar carré dans le machin carré », on a compris, merci.
Pour en revenir aux premières lignes de ce test, je tiens à insister sur le mot gâchis: Torn, c’est une balade en réalité virtuelle comme on en voudrait plus souvent au niveau de l’immersion. C’est aussi une histoire de qualité, bien doublée, aux influences honorables (les auteurs citent The Twilight Zone et Black Mirror, rien que ça) et magnifiquement mise en musique. Et pourtant, tout ce que j’en retiendrai, c’est cet insupportable gameplay composé d’un seul et unique puzzle, déjà pas bien folichon la première fois. On appelle ça gâcher son talent.
La Bande-Annonce
Réalisation: 15/20
Malgré un aliasing bien présent sur PSVR, Torn a de sacrés atouts à faire valoir. Chaque pièce du manoir regorge de détails et l’immersion est totale. Et mention spéciale au générique d’introduction, très jolie démonstration de savoir-faire en matière de VR.
Gameplay/Scénario: 12/20
Pour le coup, c’est étrange de noter ces deux éléments de manière commune, tant le gameplay est le maillon faible du soft, tandis que le scénario sauve la mise tant qu’il peut (pour les anglophones seulement). On se demande réellement qui a pu valider la répétition ad nauseam d’un seul et unique puzzle simpliste comme seule réelle composant de gameplay, exploration mise à part. Qu’il/elle se dénonce !
Bande-Son: 16/20
Signées par Garry Schyman, compositeur attitré de la franchise Bioshock, pour ne citer qu’elle, les compositions sont un ravissement total pour les oreilles. Le thème principal est, à ce titre, une merveille et on regrettera qu’il soit mis au service d’un soft aussi bancal…
Durée de vie: 12/20
On reproche souvent aux jeux VR leur faible durée de vie. Ici, on est plutôt dans la tendance inverse: entre 4 et 5 heures, c’est trop long lorsqu’on a déjà fait le tour de ce que le gameplay a à nous offrir au bout de 20 minutes à peine.
Note Globale N-Gamz.com: 11/20
Attribuer cette note à un jeu aussi soigné visuellement et musicalement me met en peine. Mais pas d’autre choix: Torn, c’est un gros concentré d’ennui enrobé de manière magistrale. Quitte à radoter, autant être aussi répétitif que son gameplay: Torn est un beau, très beau gâchis.