Review
Préquelle manga à la saga beat’em all la plus polémique de l’ère PlayStation 2 & 3, Drakengard « Destinées Ecarlates » jette un regard nouveau sur l’univers ultra violent et véritablement dépravé inventé par Taro Yoko pour le compte de Cavia et Square Enix. Si vous trouviez déjà les jeux délicieusement gores et sordides, nul doute que vous allez vous jeter à corps perdu dans la trilogie dessinée de Jun Eishima et ZET! Dans le cas contraire…
Drakengard « Destinées Ecarlates » nous plonge dans la peau de One, guerrier sanguinaire tentant par tous les moyens d’éradiquer de la surface du monde la Maladie de l’Oeil Rouge, un fléau qui transforme les humains en véritables bêtes assoiffées de sang. La particularité de notre héros, en plus d’être immunisé contre l’épidémie, est de pouvoir régénérer à volonté ses blessures en aspirant le sang infecté. Mais il possède également la capacité, en entonnant un chant mystique, de voir ses compétences de combat littéralement décuplées. Hélas, cette musique ancestrale invoque également un redoutable Dragon Noir qui n’a qu’une seule envie: déchiqueter One en morceaux!
Heureusement pour ce dernier, il est accompagné de Nero, un arbalétrier elfe pourfendeur de reptiles et accessoirement… psychopathe déviant sexuel! Après de nombreux massacres, notre fine équipe va arriver à Caerleon, en plein coeur du Palais du Prince Caim et de sa soeur, l’énigmatique Furiae, Déesse dont la mort pourrait briser le dernier sceau qui empêche… la fin du monde!
Visuellement, ce Drakengard version manga propose un trait diablement plus acéré que l’oeuvre vidéoludique dont il s’inspire, totalement libéré qu’il semble être des contraintes du « politiquement correct » en vigueur sur les jeux à l’époque de leur sortie. C’est gore, sombre, ultra-violent et sexualisé à l’extrême grâce à un dessin signé ZET, dont c’est le premier manga. L’artiste use et abuse ainsi de détails volontairement malsains lors des séances de démembrements en règle, tout en proposant un découpage fluide et très nerveux qui sied à merveille à l’ambiance « beat’em all » sauvage issue de l’oeuvre originelle. Tout au plus regrettera-t-on quelques traits un peu grossiers dans le premier volume, heureusement totalement absents du second.
Bref, le spectacle visuel est au rendez-vous, mais vous avez intérêt à avoir le coeur bien accroché car entre les têtes qui volent, les gerbes de sang, les massacres d’enfants innocents et les séquences de sexe sous la contrainte, vous allez vite comprendre pourquoi le manga est déconseillé aux moins de 16 ans et sous-titré « Pour Public Averti! ».
Sur le plan du scénario, le fait d’avoir opté pour une simple trilogie dans un univers aussi complexe que celui de Drakengard nous fait craindre une histoire un peu expédiée, d’autant plus pour qui serait nouveau venu dans la saga. Ainsi et malgré les nombreuses références à l’oeuvre de base expliquées au travers d’inter-chapitres humoristiques façon interview entre l’auteur du manga et le réalisateur du jeu vidéo, l’impression d’assister à une quête épique tout juste « survolée » étreint d’emblée le lecteur.
Il faut dire que les motivations réelles de One et Nero ne sont toujours pas explicitées à la fin du second volume alors que notre duo trouve sur son passage la redoutable… One également! On a donc terriblement peur que le troisième opus soit rushé à l’extrême histoire de proposer un récit qui se suffise quand même à lui-même, quitte à zapper une paire des questions que pourrait se poser le non initié.
Il n’empêche, pour le fan de la trilogie vidéoludique, ce Drakengard « Destinées Ecarlates » permet d’en apprendre encore plus sur l’univers torturé de Taro Yoko, et c’est un réel plaisir de voir à quel point la psyché de Caim, héros du premier jeu, provient de sa rencontre horrifique avec One et Nero, tout comme il est terriblement jouissif de retrouver une Furiae dépeinte avec une justesse maladive dans le bouquin, du haut de ses fantasmes d’inceste et de viol pour son frère, alors que sa personnalité ne se révélait au joueur qu’en toute fin du premier soft.
Drakengard « Destinées Ecarlates » est donc hautement indispensable pour les amoureux de la saga, mais risque bien de choquer les âmes sensibles et frustrer ceux qui sont complètement passés à côté du plus malsain et sanglant des beat’em all PlayStation! Vous voilà prévenus en attendant le dernier volet prévu pour ce mois-ci chez Kurokawa!