Review
Fort du succès aussi bien critique que commercial de son action-rpg heroic fantasy Dragon’s Crown, Atlus a décidé d’adapter le soft en manga sous les traits de Yuztan, scénariste et dessinateur absolument fan de ce jeu vidéo 2D made in PS3 et PS Vita. Pas évident pour lui, quand on connaît l’esthétique sublime et hors norme du soft, de reproduire les personnages ultra caricaturaux issus de l’esprit créatif de Vanillaware (Odin Sphere, Muramasa). Et pourtant, si ce Dragon’s Crown papier est plus que réussi sur le visuel, c’est étonnamment là où on ne l’attendait pas qu’il flanche : son récit !
Royaume de Hydeland. Un mystérieux portail a fait son apparition dans cette contrée reculée et paisible, amenant avec elle un flot de monstres sanguinaires. Beaucoup d’aventuriers se sont risqués à le traverser, mais aucun n’en est jamais revenu. Il se murmure çà et là que cette ouverture béante pourrait être l’œuvre d’un Dragon Maudit enfermé par les anciens, et qu’elle pourrait contenir la fameuse Couronne du Dragon, un artefact qui apportera richesse et gloire à celui qui le possédera. C’est l’occasion de suivre le destin d’un groupe de mercenaires composé d’un guerrier, d’un nain, d’une elfe, d’une amazone, d’un mage, d’un voleur et d’une magicienne aux motivations diverses, qui vont très vite comprendre que cette porte millénaire cache en fait une terrible machination destinée… à détruire le monde !
Visuellement parlant, ce Dragon’s Crown en version manga respecte scrupuleusement le chara-design et les environnements du jeu de Vanillaware. Nous avons ainsi droit à des héros très caricaturaux comme le guerrier beau-gosse taillé en V, le Nain petit mais à la musculature surdimensionnée, l’amazone bodybuildée à outrance ou encore la magicienne et ses boobs qui défient les lois de la pesanteur. Bref, si vous n’aviez pas adhéré au style de l’Action-RPG sur Vita, vous détesterez le graphisme de cette version papier. Nous, on adore, ça tombe bien non ?
On notera surtout l’impressionnant travail d’encrage sur les pages, les détails à foison sur les corps et les armures, ainsi que les plans plutôt osés et sacrément fan service sur la gente féminine. Par contre, le jeu étant assez axé baston, il était primordial que les séquences d’action du manga soient légion, ce qui est le cas, mais surtout qu’elles proposent une lecture fluide et compréhensible. Hors, le découpage n’aide souvent en rien à la lisibilité de ce qui se passe sur le champ de bataille ! On doit généralement s’y reprendre à plusieurs fois avant de savoir qui fait quoi, la faute à des raccourcis de mouvements mal calibrés et trop abrupts.
A ce souci graphique s’ajoute également un écueil scénaristique. En effet, ce shonen se raconte sous la forme de 12 épisodes qui sont autant de quêtes distinctes issues du soft, résumées chacune en seulement 14 pages recto-verso. Dur de se prendre au jeu tant les récits sont expédiés malgré l’impressionnante épaisseur du volume, laquelle nous faisait miroiter une histoire longue et épique au lieu de ce découpage vidéoludique inadapté pour un manga. Certes, on a toujours un fil rouge qui nous amène à l’ultime chapitre sous forme de bataille finale dantesque, mais il est bien mince entre la baston à outrance, les scénettes comiques sur les persos qui restent à l’auberge, et le peu de background que l’auteur arrive à insuffler à ce trop gros casting de personnages sonnant bien creux au final, contrairement à son modèle numérique sur consoles.
En conclusion, on pourra vraiment être admiratif sur le respect visuel réalisé par Yuztan de la mirifique 2D imaginée par Vanillaware pour son oeuvre, laquelle nous offre des figures féminines aux formes vertigineuses et des mâles aux muscles saillants prêts à en découdre avec le bestiaire de monstruosités plutôt bien fourni de ce récit d’heroic fantasy.
Hélas, avec un découpage pas vraiment brillant et une construction de l’histoire bancale qui tente trop de suivre son modèle vidéoludique en le résumant à l’extrême, ce Dragon’s Crown ne procure juste qu’un bon divertissement qui ne restera pas dans les mémoires et ne plaira assurément qu’aux fans du soft, lesquels pourront se délecter de la bonne dose de fan service ultra sexy et des bastons plutôt jouissives de leur jeu préféré.