Review
Courte mais d’une intensité rare, voilà comment ou pourrait résumer l’adaptation manga de Black Bullet, cette histoire d’un combat post-apocalyptique entre des binômes atypiques et un virus mutagène en plein cœur d’un Tokyo menacé par une destruction totale. Le premier volume nous avait particulièrement enthousiasmés grâce à un rythme incroyablement accrocheur, des persos charismatiques (quoiqu’un peu jeunes) et un dessin d’un dynamisme rare, aussi croisions-nous les doigts pour que cette suite et fin réponde à toutes nos interrogations en conservant l’intérêt du lecteur. Bonne nouvelle : c’est le cas même s’il manque à ce Black Bullet édité par Doki-Doki un élément essentiel pour atteindre le statut d’œuvre culte… Une vraie conclusion !
Le Promoter Rentâro et sa jeune Initiator Enjû pensaient n’avoir affaire qu’à une simple enquête sur un Gastrea clandestin infiltré dans une Tokyo pourtant surprotégée, mais il n’est en rien. En effet, alors que l’Impératrice convoque une assemblée exceptionnelle de tous les miliciens de la capitale pour leur confier une périlleuse mission, le surpuissant Kagetane Hiruko fait irruption avec sa fille, enfant maudit et Iniator de son état : Kohima. A la recherche d’un artefact qui lui permettrait de réveiller un Zodiac Gastrea pour anéantir l’Humanité, l’homme aux incroyables techniques de combat parvient à mettre K.O. tous ses opposants avant de partir sur les traces de la même cible que ses anciens collègues miliciens : le fameux Héritage des Sept Etoiles. Une course contre-la-montre s’engage alors entre ces derniers et notre homme masqué qui traîne derrière lui un lourd secret. Vous l’aurez compris, l’affrontement final opposera notre « grand méchant » et sa progéniture face au binôme de héros composé d’un Rentâro plein de surprises et d’une Enjû à deux doigts de se transformer en Gastrea elle-même, le tout sur fond de fin du monde toute proche. Tout un programme !
Comme pour le premier tome, ces volumes 2, 3 et 4 de Black Bullet respirent la maîtrise graphique à tous les niveaux, en corrigeant même les petites errances de leur aîné. Exit le papier un peu jauni qui dénaturait les trames, de même que le look un peu enfantin des héros, qui gagnent ici en maturité grâce à des expressions de visages plus sombres et torturées, amplifiant à merveille la psyché des héros. Les scènes de combat sont, quant à elles, découpées avec une certaine maestria et le dynamisme du trait fleure bon la frénésie de coups surpuissants pour l’un des résultats visuels les plus jouissifs qu’il m’ait été donné de voir. On ressent chaque impact avec une puissance démesurée, et jamais Hon Morino ne perd le lecteur en plein milieu de la baston. Rien que pour ses affrontements, ce Black Bullet vaut déjà l’achat, même si on déplorera au final le manque de variété de ces derniers, se contentant de rejouer un énième duel Rentâro/Kagetane et Enjû/Kohima. Heureusement qu’un autre binôme au destin tragique en la personne de Shogen Ikuma/Kayo Senju va venir mettre son grain de sel dans tout ça histoire de diversifier les plaisirs.
Si le manga est totalement inattaquable sur le dessin, véritable ode à la baston survoltée, nous avions peur que le format en quatre volumes seulement pour une œuvre qui semblait si dense dans son background ne nuise à la compréhension du récit. Pourtant, en choisissant volontaire de laisser de côté tous les personnages secondaires abordés dans le premier tome (le Doc Sumire ou la boss Kisara) et en en oubliant quelques uns issus du Light Novel, l’auteur parvient à garder une histoire concise et passionnante, les révélations s’enchaînant au rythme des coups et des échecs, avant d’atteindre leur point culminant dans un quatrième opus qui possède finalement le seul gros défaut de cette quadrilogie : l’absence d’une véritable conclusion !
En effet, bien que le duel Rentarô/Kagetane trouve un terme royal, on apprend l’existence d’une douzaine de Gastrea de niveau 5 (ceux ayant entraîné la destruction de la quasi-totalité de l’Humanité il y a dix ans de cela) et d’une machination au cœur même du gouvernement tokyoïte, sans parler de la révélation du fameux « Héritage des Sept Etoiles » qui en décevra plus d’un par son côté très laconique. Bref, l’auteur amène clairement une suite, qui n’existe pour le moment qu’en Light Novel et ne devrait jamais voir le jour en manga hélas. Du coup, si vous n’envisagez pas de continuer l’épopée Black Bullet via les romans, vous risquez de ressortir un peu décontenancé de ce final qui aurait mérité plus de réponses et moins de nouvelles interrogations.
En l’état, ce Black Bullet s’écarte donc suffisamment du Light Novel pour susciter un réel intérêt chez le lecteur connaisseur de l’œuvre de Shiden Kanzaki et permettre aux autres, par ses quatre volumes, de suivre un récit qui se tient de bout en bout, avec une sacrée dose d’action survoltée et un univers sombre à souhait, idéal pour avoir envie de découvrir les bouquins et d’approfondir ce monde post-apocalyptique réellement passionnant, dans lequel de simples enfants infectés dès la naissance et rejetés par la population tentent pourtant de sauver une Humanité sur le déclin. Une vraie bonne pioche pour Doki-Doki !