Review

Contrast, c’est typiquement le genre de softs qui vous font de l’œil dès leur annonce. Première bande-annonce mettant immédiatement dans le ton, univers manifestement envoûtant, tout était à priori réuni pour  célébrer l’arrivée d’une nouvelle pépite issue du monde captivant des développeurs indépendants. Une fois la manette en mains, le coup de foudre résiste-t-il à l’épreuve du premier rendez-vous ?

Ça va jazzer

Les silhouettes des personnages pourront être escaladées

Se déroulant dans un univers inspiré du Paris des années 20, Contrast nous présente la petite Didi, fille de Kat, une chanteuse de cabaret et de Johnny, un père absent adepte de petites magouilles, qui refait brusquement surface après une prestation de la dame. Ayant assisté à la scène après s’être éclipsée de sa chambre, Didi va tout faire pour les sortir d’une situation compliquée. Elle pourra compter sur son amie imaginaire, l’acrobate maigrichonne Dawn, qui a le pouvoir de se changer en ombre.

C’est ce personnage irréel qu’incarnera le joueur. Navigant dans un univers parallèle à celui de la petite fille, Dawn pourra se servir des ombres pour évoluer à travers les décors. S’appuyant sur un concept déjà utilisé par le très furtif A Shadow’s Tale sorti sur Wii en 2010, les développeurs de Compulsion Games, dont c’est ici le premier jeu, en profitent pour mêler plateforme 2D et 3D. Mélange réussi ?

Contrast et paillettes

Concentrons-nous tout d’abord sur ce qui justifie l’intérêt que l’on peut porter à Contrast: son ambiance. La bande-son jazzy magnifique (mais étrangement trop en retrait), l’univers typé films noirs et les jeux de lumières concourent à donner au titre un cachet inimitable. Le doublage français n’est pas en reste : bien qu’inégal, il convient de souligner la performance très juste de la comédienne donnant vie à la petite Didi, très attachante et qui donne envie de la suivre dans ses péripéties nocturnes.

Le titre jouit d’une direction artistique irréprochable

La mise en scène a également fait preuve d’originalité en adoptant le point de vue de Dawn : en lieu et place des personnages, on n’apercevra que leurs ombres gesticulant sur les murs. Certaines scénettes pourront également être rejouées afin de récolter des orbes nécessaires à la progression, l’acrobate bondissant alors sur les silhouettes tandis que le dialogue suit son cours. Une excellente idée.

On aurait donc pu espérer un scénario à la hauteur de la personnalité dégagée par le soft. Hélas, la trame est finalement plutôt convenue et achevée par une conclusion en tous points décevant, gâchant brusquement certains enjeux scénaristiques pourtant prometteurs. Autre point négatif, les objets récoltés dans le jeu, étoffant peu à peu la trame, ne sont pas intégralement traduits en français. Dans le cas d’une coupure de journal, les non-anglophones devront par exemple se contenter du titre. Triste, ces items étant pourtant l’occasion d’en apprendre plus sur la vie des protagonistes.

Contrast, le jeu in-débandant

Avec une ambiance et une direction artistique pareille, rien ne peut venir inverser l’enthousiasme ressenti durant le premier contact avec le jeu, pas vrai ?… Malheureusement, c’est tout l’inverse qui se produit. À trop se concentrer sur la personnalité de leur bébé, les développeurs en ont oublié tout ce qui fait un vrai bon jeu. Pour commencer, la maniabilité lors des passages en 3D est tout simplement calamiteuse, Dawn n’étant visiblement acrobate que de nom. On a donc l’impression de diriger une savonnette et il arrivera fréquemment de chuter d’une plateforme par la faute de cette maniabilité tout sauf précise. Et quand la caméra s’en mêle, on n’est pas loin de la crise de nerf.

Dommage que la transformation en ombre ne débouche pas sur des utilisations vraiment recherchées

Heureusement, une fois passée du côté des ombres, Dawn se dirige avec plus d’aisance, même si certains soucis de collision restent présents dans tous les cas. Mais le jeu n’étant pas un platformer pur, si les énigmes rattrapent le tir, il n’y a pas de raison de s’alarmer, me direz-vous.

Et le problème est bien là : avoir un bon concept est une chose, l’utiliser intelligemment en est une autre. Les puzzles sont d’une banalité affligeante et ne font que très rarement interagir la fillette et son amie muette, là où il y avait pourtant moyen de la jouer original. Au final, on ne retiendra que la possibilité de transporter des caisses dans le plan des ombres, ceci donnant lieu aux quelques rares bonnes utilisations du gimmick, notamment lorsque, à l’aide d’un projecteur, il faudra manipuler l’ombre d’une caisse qui nous servira ensuite de plateforme.

Ce constat est d’autant plus rageant que lorsque le jeu s’en donne la peine, il offre de vraies bonnes idées. On pense notamment à cette séquence, qui risque au final d’être la seule à rester dans la mémoire des joueurs, où Dawn joue le rôle d’une princesse au sein d’un théâtre de marionnettes en ombres chinoises. Le gameplay se mue alors durant quelques minutes en cousin éloigné de Limbo, accompagné de la voix du père de Didi qui sert de narrateur pour l’occasion. Ou comment encore renforcer le sentiment de gâchis qui parsème l’ensemble de l’œuvre, en comparaison des sentiments ressentis durant cette unique scène mêlant à la perfection gameplay et narration.

Lost in Shadow

On s’émouvra d’autant plus de cette absence quasi complète de scènes marquantes que le jeu se boucle en moins de 3 heures. Non seulement c’est court, mais on pourra en décompter les quelques relances de checkpoints nécessaires à la suite d’un bug, malheureusement pas si rare, bloquant le personnage dans un élément de décor. Des bugs, le jeu en est d’ailleurs rempli et il serait trop long et déprimant d’en faire la liste ici. On dira tout simplement que le soft est visiblement sorti trop tôt, nombre de ses tares ayant le goût flagrant du travail pas fini.

Par conséquent, et aussi triste que cela peut être à constater et à écrire au vu de ses qualités esthétiques et narratives, Contrast est une œuvre mineure, condamnée à rester dans l’ombre des plus grands.

Le Video-Test par Neoanderson

Réalisation: 12/20

Sans aucun doute, la direction artistique mérite des éloges. On aimerait pouvoir en dire autant du traitement qui lui est réservé dans le jeu. Les bugs à foison, dont certains obligent à relancer le dernier checkpoint, auront raison de la patience de nombreux joueurs. Quel gâchis!

Gameplay/Scénario: 12/20

Même si pas totalement inédite, l’idée de base est excellente. On aurait aimé qu’elle soit utilisée de manière plus inventive, la plupart des puzzles manquant d’ingéniosité. La maniabilité trop sensible de Dawn n’arrange rien et on pestera régulièrement devant son écran. Le scénario, intrigant au début, peine à maintenir l’intérêt sur la durée, jusqu’à un final expédié et très décevant.

Bande-Son: 14/20

Pas de méprise : la bande originale de Contrast est un petit bijou. Dès l’écran titre, des sons jazzy résonnent et flattent les oreilles. Mais une fois plongé dans l’aventure, la musique se fait trop distante, voire carrément absente par instant et plonge le joueur dans un sentiment de solitude étrange. Heureusement que le doublage français, globalement de qualité (Didi en tête), est là pour nous tenir compagnie.

Durée de vie: 08/20

Entre 2H30 et 3H, reset à cause de certains bugs inclus. C’est très peu, même pour un soft vendu 15 euros, et ça serait pardonnable si le soft offrait une expérience vibrante sur toute sa faible longueur. Malheureusement, c’est loin d’être le cas.

Note Globale N-Gamz.com: 11/20

Victime d’une fin de développement très probablement rushée, Contrast fait sans conteste partie des plus grosses déceptions de cette fin d’année et sera bien vite oublié, malgré ses qualités artistiques indéniables.



About the Author

Guib
Accro (mais sainement ; et oui, amis journalistes, c’est possible) aux jeux vidéo depuis le jour où j’ai reçu ma Super Nintendo accompagnée de Super Mario All Stars à l’âge de 6 ans, je suis passionné par les jeux de plate-forme, mais pas uniquement. Peu importe le genre, je suis surtout intéressé par les titres qui ont une âme et qui dégagent une réelle personnalité. Quelques-uns de mes jeux cultes : Yoshi’s Island, Beyond Good & Evil, Ico et les jeux Rockstar (oui, ça tranche avec le reste mais ces gars-là m’ont rarement déçu). J’ai aussi une petite faiblesse moins avouable pour les jeux nanars descendus par la plupart des testeurs, mais chut. Etant fan de cinéma fantastique et écrivant depuis quelques mois des critiques de films, j’ai eu envie de me diversifier et de me lancer dans le test de jeux vidéo, et me voilà !